30Fermer32
HippopotameLe 01/08/2007 à 19:31
En tout cas j'ai jamais lu une phrases aussi ... géniale.

Ca a l'air de t'étonner, c'est pourtant la loi de l'Histoire et ça ne date pas d'hier.

Quand les français ont propagé la Révolution en Europe, certains peuples en ont accepté les valeurs (relire l'introduction de la Chartreuse de Parme miam), d'autres y sont resté absolument réfractaires (L'identité nationale allemande a commencé à se forger en réaction aux idées révolutionnaires).

Plus proche de nous, au XXième siècle, le communisme est un exemple très éclairant. En Russie, en Chine, au Vietnam, à Cuba, le communisme à triomphé grâce au soutien massif des populations, et malgré l'opposition militaire féroce des plus grandes puissances du monde. Ailleurs dans le monde, les peuples n'ont pas adhéré du tout au communisme. En France ou en Italie, il était de puissance moyenne mais politiquement impuissant. En Allemagne ou au Japon, il était insignifiant. En Angleterre ou aux Etats Unis, il n'a concerné qu'une poignée d'excentriques.

La soviétologie a produit de nombreuses études en profondeur des sociétés communistes, et on sait aujourd'hui que les sociétés qui ont basculé d'elles même dans le marxisme léninisme ont toutes un même point commun anthropologique : leur système familial traditionnel est très autoritaire, très égalitaire, et exogame (c'est ce qu'on appelle la famille communautaire exogame). La coïncidence des cartes du communisme et de la famille communautaire exogame est quasi parfaite. L'immense majorité des pays de famille communautaire exogame ont basculé dans le communisme au XXième siècle, les quelques rescapés ont été fortement tenté (par exemple la Toscane est une région italienne communautaire exogame, bastion électoral du PCI). Les pays qui n'ont pas ce type familial n'ont jamais développé un communisme puissant et seule la conquête militaire a pu faire adhérer l'Europe de l'Est, sans réussir à conquérir l'esprit des gens.


Voilà pourquoi j'affirme qu'il y a des limites mentales, anthropologiques, aux grandes idéologies conquérantes. Les Etats Unis ne peuvent pas être communistes, pas plus que l'Espagne ne peut être nazie, la Russie libérale, le Pakistan social-démocrate ou la France islamiste.


L'islamisme est une idéologie qui obéit à des mécanismes tout à fait semblables aux autres idéologies. Elle repose sur les valeurs d'un type familial qui s'appelle famille communautaire endogame (caractérisée par l'anti individualisme, l'égalité des frères, le statut inférieur des femmes, le mariage préférentiel entre cousins) ; elle est présente dans tout le monde arabe, et dans une bonne partie du monde arabo-musulman. Dans ces pays on peut assister parfois à des éruptions islamistes, qui débouchent parfois (mais c'est assez rare, l'Iran est le seul cas sérieux) sur des régimes islamistes stables. Ailleurs dans le monde, il peut y avoir exceptionnellement une agitation islamiste sans lendemain, ou le plus souvent rien du tout.

En fait l'examen du progrès social et culturel (alphabétisation de masse) dans la sphère musulmane permet de prévoir quels seront les prochains pays à subir une crise islamiste : il s'agit très exactement du Pakistan et de l'Arabie Saoudite.
Va dire ça aux Serbes (Kosovo) et aux Russes (Tchéchénie) smile

Ben justement, les Russes connaissent l'islam bien mieux que nous. Il y a des tas de musulmans en Russie, et depuis longtemps : les huit millions de Tatars, sages comme tout malgré leur nombre. Cela illustre bien ce que je disais plus haut : l'islam des tatars, peuple de famille communautaire exogame, ne donnera jamais d'islamisme.

La Tchétchénie rentre aussi parfaitement dans ce que j'ai dit : le Caucase est le début de l'aire communautaire endogame du Moyen-Orient.

Quant aux musulmans d'ex-Yougoslavie (ou d'Albanie, ce qui est à peu près les mêmes mentalités), qui ne sont pas porteurs du type communautaire endogame, je prétends qu'une fois la paix revenue il n'y aura certainement pas de régime islamiste, au sens iranien, et que d'ailleurs la religion n'était pas du tout au coeur des causes de la guerre.
Perso, je connais bien l'Indonésie (ma femme étant originaire d'Asie du Sud) et franchement, rien à envier aux pays arabes : du fantomas partout et pas mal de barbus. Je te raconte pas quand tu veux picoler un coup dans les bars, on te jette des regards assassins.

Et bé voui, le monde est vaste et varié! Les indonésiens ne sont pas des occidentaux, et ce ne sont pas des arabes non plus.
Mais le cas de l'Asie du Sud Est (famille anomique) est encore plus compliqué à expliquer, je m'arrête là.

Il ne faut jamais dire jamais (il faut voir ce qui se passe dans notre pays avec l'explosion du nombre des constructions de mosquées cathédrales (Créteil, Marseille, Strasbourg ...).

Mais non, il y a des frontières invisibles, c'est Hippo, notre maitre à penser, qui le dit ! picol

Allez, rassure toi, même dans 50 ans tu ne seras pas obligé de porter la barbe smile

Les populations "de culture musulmane" en France voient leur taux de pratique diminuer rapidement avec les générations, de la même manière qu'il y a un siècle, lorsque les bretons très pieux qui montaient à Paris du fond de leur province catholique et adoptaient très vite l'agnosticisme ambiant.

D'après une enquête CSA de 2006, 17% des musulmans de France vont à la mosquée (au moins) une fois par semaine (7% des catholiques vont à l'église). Chute vertigineuse par rapport à la société d'origine, et qui illustre bien le pouvoir assimilateur de la société française. Le contraste est fort avec l'Allemagne, où les turcs immigrés sont plus pratiquants que les turcs de Turquie. En Angleterre, en Belgique, au Danemark, la situation n'est pas glorieuse non plus.

Il traine en France une erreur de perspective sur le bilan du processus d'intégration des musulmans (erreur probablement minoritaire, au fond la plupart des gens s'en foutent de l'islam). La situation était bien plus dramatique dans les années 60. Dans les banlieues populaires, à Billancourt, provinciaux, italiens, espagnols, antillais, polonais, étaient intégrés sans trop de problème, mais pas les algériens. Ils étaient, beaucoup plus qu'aujourd'hui, enfermés dans leur religion et leurs gosses posaient déjà des problèmes. C'était aussi l'époque des bidonvilles ethniques (où a grandi l'un de nos anciens ministres, le portrait qu'il en fait dans son roman autobiographique est intéressant). Quoiqu'en pensent les esprits chagrins, la situation actuelle est infiniment préférable. L'émergence du Front National dans les années 80 correspond paradoxalement à une accélération du processus d'assimilation : l'affrontement parfois physique (En 1981 un maire communiste détruit au bulldozer des logements d'immigrés) se déplace sur le plan verbal.

Aujourd'hui les brûleurs de voitures ne sont en aucune façon des religieux, ce sont des paumés, des névrosés sociaux. On en est là et il reste du chemin à faire, mais clairement la religion n'est plus qu'un facteur secondaire.


Dans l'espoir de t'avoir appris quelque chose... smile