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Yoshi NoirLe 08/12/2021 à 23:53
Zerosquare (./3151) :
Dans les semaines qui suivent l'injection, oui. 6 mois plus tard, nettement moins. D'où la nécessité des rappels, sauf que ce n'est qu'une fuite en avant : c'est intenable à long terme pour plusieurs raisons.
Normalement, le vaccin contre la grippe saisonnière, c'est chaque année.

Sinon je fais partager ce pavé sur l'état de ce vaccin ARNm trouvé ailleurs
Je me permets de vous proposer un petit point d'info sur le "rappel" du point de vue immunologique.
Je pense que la notion de "rappel" est mal connue et très mal expliquée, y compris par des médecins, alors, voici mes deux centimes.

En apparence:
- le rappel est une troisième injection du vaccin, à l'identique des deux premières (les cas à part sont les primo-infectés ou les vaccinés hétérologues, mais ça change rien à ce qui suit)
- le rappel va recharger le corps en anticorps (Ab*) neutralisants circulants anti-covid.

C'est pas faux mais c'est juste un peu à coté de la plaque (le doigt, la lune, etc...).
Si l'on se place du point de vue de l'organisme, et du point de vue immunitaire, c'est bien différent, et lourd de sens.

Le rappel n'est pas qu'une troisième injection.
Les premières sont deux "premières doses": elles se font chez un sujet naïf à l'infection, et sont rapprochées dans le temps. Le rappel, lui, intervient quelque mois après.

La présentation au système de l'antigène (aka la protéine spike) par le vaccin ne se fait pas du tout dans le même contexte.
Des études dans le modèle souris mais aussi chez l'Homme ont fait changer notre vision des choses depuis, allez... hier ou avant-hier, une dizaine d'années embarrassed .
Ainsi, le rappel va mobiliser des populations cellulaires spécifiques, peu connues il y a quelques années, qui n'auront pas ou peu été mobilisées lors des premières injections. Elles ont des noms assez rustiques : cellules de l'immunité innée "entraînées" (je traduis de "trained", et rien à voir avec les T ou B mémoires), lymphocytes T folliculaires etc...chacune fait son boulot, et aucune ne bosse seule.
Le rappel, en arrivant bien après la première bataille (mais pas trop après quand même) va donc enrichir, diversifier la flotte de cellules vouée à la protection contre le pathogène.
Sans rappel, on ne sait pas si on bénéficie ou pas de ces "commandos spéciaux *".
Les mécanismes sont compliqués et encore mal connus, mais la présence d'Ab circulants au moment du rappel (avant qu'ils ne disparaissent) y est sans doute pour quelque chose...

Ils vont coller à la spike produite par le rappel et seront reconnus par celles des cellules immunitaires qui possèdent le récepteur aux Ab. En gros, la tête de l'anticorps est collée à l'antigène, et le récepteur à l'anticorps va l'attraper par la queue, et s'activer. Ces cellules là sont de l'immunité qu'on dit "innée" (macrophages,"tueuses naturelles", monocytes...) Ce que je viens de décrire, on ne peut pas être sûr que cela se soit passé lors des deux premières injections parce que le temps que les lymphocytes naïfs soient éduqués et produisent des anticorps - quelques jours- ... et que les meilleurs anticorps soient sélectionnés -3 semaines-... il n'y a peut-être plus d'antigène qui traine.
Donc, au rappel, il se passe quelque chose en plus:
- comme dans les deux premières injections, présentation de la spike par les cellules sentinelles aux lymphocytes pour les éduquer, à l'aide d'un certain outil moléculaire (c'est la présentation la plus courante de la "vaccination")
- mais, en plus, découverte de la spike collée aux anticorps par les cellules de l'immunité innée à l'aide d'un autre outil moléculaire.
L'intérêt, c'est aussi que ces dernières, le travail accompli, restent dans une forme de "vigilance", pas aussi poussée que le stand-by des lymphocytes mémoires, mais qui permet une réponse rapide (pas spécifique de l'antigène et/ou du sars-Cov2 !).

A retenir: une vaccination complète, c'est avec rappel. On aimerait que nos nouveaux vaccins (ARNm ou vecteur adénoviral) n'en aient pas besoin, mais on n'en sait rien aujourd'hui.

C'est à mes yeux la principale vertu du rappel vaccinal: pas un simple "rechargement" des munitions, mais un évènement spécifique qui joue son rôle propre pour une stratégie vaccinale optimisée.
Ça, c'est dans un cas général. C'est la partie que le grand public connaît trop peu amha.

Or, nous ne sommes pas dans un cas général: nous sommes dans un contexte pandémique de circulation élevée d'un virus archi-contagieux. Sauf erreur de ma part, le taux de transmission nominal, sans mesures barrières, modélisé, du variant delta n'était-il pas estimé à 8 ou 10 il y a quelques mois ? On se rapproche donc de la contagiosité de la rougeole, et je suis d'une génération où l'on ne demandait pas "as tu eu la rougeole ?" mais "à quel age as tu eu la rougeole ?".

C'est dans ce contexte que le rappel présente l'avantage de faire remonter avec ampleur les taux d'Ab circulants neutralisants, et renforcer la résistance collective aux contaminations inter-individuelles. La présence abondante d’anticorps protecteurs dans le sang et les muqueuses va permettre, en cas d’infection, de neutraliser au plus vite les particules virales et de déclencher sans délai la réponse immunitaire, sans même attendre la réactivation des expertes cellules « mémoires » qui ont été crées par les premières injections. Pour la même raison, une personne vaccinée avec rappel, si elle est infectée, émettra dans son entourage des particules virales encore moins contaminantes vis à vis des tiers parce que ces particules virales seront recouvertes de ses anticorps neutralisants.

Enfin, on n'a rien à gagner à attendre que les taux d'Ab neutralisants circulants soient au plus bas pour se faire rappeler, tout au contraire.
J'ai écrit plus haut que la présence des ces Ab (issus des premières injections pour simplifier) contribuait à l'efficacité du rappel. Je pense aussi que faire le rappel avant que ne s'effondrent les taux d'Ab neutralisants circulants rend le rappel plus SAFE. Oui, on va pas se mentir, il y a toujours un risque en biologie. Ici, le risque est considérablement plus faible que le risque dû à la maladie Covid. Il n'empêche, lors des immunisations, il y a fabrication de la spike par des cellules cibles qui vont finir détruites par les cellules immunitaires, ce qui conduit à la libération d'une quantité -faible et non renouvelable- de spike dans les tissus et la circulation. Cette spike n'ira pas très loin, bien vite scotchée qu'elle sera aux récepteurs ACE2 très abondants un peu partout, mais, localement et sur un temps fini et bref, ça peut induire des lésions cellulaires. Et, je le répète, dans un rapport bénéfice/risque infiniment à l'avantage du vaccin versus la maladie, la question n'est pas là. Si le rappel se fait avant que le taux d'Ab neutralisants circulants issus des premières injections ne chute trop (ie: 6-8 mois dans le cas du Covid), cette hypothétique spike libérée sera neutralisée par ces derniers. Et, ça tombe bien, ça ne va pas déplaire aux cellules innées dont on a parlé plus haut.* Et c'est alors une boucle vertueuse qui se met en place.

Sources indiquées par ce posteur :

Front Immunol. 2021; 12: 612747.
Published online 2021 Mar 8. doi: 10.3389/fimmu.2021.612747
PMCID: PMC7982481
PMID: 33763063
Optimize Prime/Boost Vaccine Strategies: Trained Immunity as a New Player in the Game
Jean-Louis Palgen,1,2 Yanis Feraoun, Gaëlle Dzangué-Tchoupou, Candie Joly, Frédéric Martinon, Roger Le Grand, and Anne-Sophie Beignon,*

Front Immunol. 2015; 6: 16.
Published online 2015 Feb 2. doi: 10.3389/fimmu.2015.00016
PMCID: PMC4313784
PMID: 25699040
Memory T Follicular Helper CD4 T Cells
J. Scott Hale,* and Rafi Ahmed