NilLe 28/01/2009 à 16:26
Non mais... enfin, les ethnologues ne mettent pas en équation (pour les sociologues, il y a une partie d'entre eux - les statisticiens - qui essaye de le faire). Tu confonds des comportements génériques et une mise en équation. La vie a trop de paramètres pour pouvoir être mise en équation (sinon il n'y aurait jamais de pétage de plombs, typiquement). Cela dit, on retrouve bien dans ce que tu dis quelque chose d'assez spécifique au monde tel qu'il est depuis les années 80. Au désir d'anti conformisme des années baba-cool, on a voulu absolument non pas poser des équations sur des comportements mais plutôt faire rentrer des comportements dans des observations générales (sur de courtes périodes, sans aucun recul si ce n'est la perception d'immortalité et de puissance qu'ont laissé se dessiner les années 80-90). A tel point, justement, qu'on ne supporte plus, au niveau social, l'écart de comportement. Celui qui pète les plombs *doit* avoir des problèmes psychologiques, c'est évident. Alors on le médiatise, on en fait une bête de foire aussi curieuse qu'elle nous renvoie indiscutablement à des parts de nous-même que nous avons été encouragés à garder à l'intérieur. Ce qui fait qu'on parle beaucoup des comportements inhabituels et dérangeants, mais qu'on ne les accepte pas.
C'est d'ailleurs assez amusant que tu parles de Freud. Il n'a pas "mis en équation" (au contraire, même, le fondement de la psychanalyse est son adaptation à l'individu), mais il a mis en lumière des comportements généralement observables, ainsi que des ressentis partagés par l'ensemble des individus d'une population donnée. Cela dit, on peut remarquer qu'il a fait ça à une époque, justement, où on ne comprenait plus grand chose sur l'être humain (j'associe ça à la déchristianisation, d'ailleurs). C'est une façon de se créer des repères pour se sentir mieux. Si, aujourd'hui, on voit fleurir une profusion de raisonnements "équationnistes", je suis intimement persuadé que c'est en réponse à une peur de l'inconnu. Inconnu de ce que nous sommes, de ce que nous allons devenir, de ce que nous cachons au fond de nous.
Certains vont voir les oracles, mettent à la mode le créationnisme ; d'autres essayent de formaliser ce qui n'est pas formalisable, et pour cause : nous n'avons pas le recul pour le faire (nous sommes en plein dedans).