very (./43) :
Puis Muray, au final, fait un peu plus confiance en la masse (qui a parfois le bon ton de voter mal ) qu'en l'élite polotico-journalistico-artistico-européenne (entièrement festovocratisée), même si ça reste très prudent.
C'est intéressant ça.
C'est vrai que la petite bourgeoisie morale et festive décrite par Muray n'est pas le peuple, c'est une élite (Manu la décrirait en terme de nouvelle stratification éducative). En filigrane, le peuple s'oppose à cette élite. Mais chez Muray ça ne reste qu'en filigrane, comme tu le notes. Quand le non sort vainqueur du referendum de 2005, Muray exulte avec talent, mais le peuple reste transparent, il existe à peine. Dans tout son texte "on a marché sur le oui", on ne trouve qu'une expression "électeurs d'en bas" qui restent anonymes et mystérieux.
Je crois qu'il y a là l'essence de ce que reproche Manu aux "pessimistes culturels".
Bon, Manu, Murau, Michéa et bien d'autres... ont à peu près les mêmes réflexes tripaux ; des structurations politiques et sociales qui sont proches ; des jugements de notre monde post-moderne qui sont compatibles. Mais le premier reproche aux autres d'être des narcisses supplémentaires. L'incapacité à voir le peuple est un comportement narcissique. Le pessimiste culturel occupe la niche écologique de l'intellectuel grincheux, en autarcie, de la même façon que l'homo festivus occupe sa propre niche écologique, en autarcie ; de la même façon que tous les groupes sociaux, culturels, économiques, repliés sur eux même. A d'autres époques le pessimiste culturel aurait été un combattant, engagé directement ou indirectement (=récupéré) par des mouvements politiques ou sociaux. Il n'aurait pas utilisé son verbe uniquement pour faire de la description et de l'ironie, mais il se serait aussi consacré à la prospective et la programmation politique.
Du coup le pessimiste culturel est un narcisse lucide, mais qui ne sert à rien. Un gros gâchis.
(des cross)