./61932 > Juste un truc important: la liberté d'expression n'interdit pas qu'on t'embobine et n'excuse pas l'ignorance. Elle défend de la blâmer, mais là on parle de la parole politique officielle du chef de l'État, il ne peut pas décemment faire n'importe quoi. Et puis la liberté d'expression c'est pas la liberté d'interprétation, qui sont deux choses bien distinctes, on peut dire ce qu'on veut, mais parfois il n'y a pas 2 sens à une phrase, parfois au contraire on peut y trouver ce qu'on veut.
Et c'est justement dans ce hiatus que se cache l'enculade sémantique des discours officiels.
De plus si tu considères que la liberté d'expression autorise à utiliser n'importe comment des expressions historiquement connotées (y a des propos et des références qu'on ne fait pas à la légère, quand on invoque "la part maudite" de Georges Bataille (je m'étais trompé d'expression, de tête, tout à l'heure) on ne peut pas décemment soutenir que ça veut dire que les pauvres et les miséreux sont la part d'ombre de la société puisque chez Bataille ce n'est pas ça, pour Bataille la part maudite c'est l'excès d'énergie vitale, qui mène aux vices, à la violence, aux sacrifices, aux pulsions les plus négatives (les Ombres de Jung, ou tout le pulsionnel de mort chez Freud, en simplifiant), alors il est simplement impossible de commenter quoi que ce soit parce quelqu'un pourrait ne pas aimer ce que tu dis ou quelqu'un pourrait se sentir frustré parce que tes propos mettent à mal son microcosme. Il faut alors placer 250 disclaimers et trigger warnings avant pour bien rappeler une évidence (et pour citer une connaissance: "on ne parle pas des évidences"): que ma position, mes propos n'exigent pas ton assentiment, mais ton acceptation. Tu acceptes que je le dise et que je parle pour moi, tu n'es jamais forcé de t'y ranger et c'est implicite.
Ce mode d'invocation de la liberté d'expression me fait invariablement penser à une phrase d'Asimov sur les excès d'icelle aux USA, dans son article
"Un culte de l'ignorance" pour Newsweek en 1980:
There is a cult of ignorance in the United States, and there always has been. The strain of anti-intellectualism has been a constant thread winding its way through our political and cultural life, nurtured by the false notion that democracy means that “my ignorance is just as good as your knowledge.”