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Bonjour/Bonsoir !
J'ai regardé les différents sujets traitants de la poésie, j'y ai trouvé quelques réponses mais reste encore indécise.
Voilà, je suis en Première Littéraire, et j'ai une dissertation à écrire sur la poésie. Mon plan est incomplet et j'aurais aimé avoir votre avis sur celui-ci et peut-être quelques idées, si vous avez le temps bien sûr ! : )

Mon plan :

I - Le poète se présente comme un artisan du langage

1 - Il cherche, dans son écriture, à produire du "beau", utilisant ce que le monde lui offre pour émerveiller nos sens
2 - Le poète crée un nouveau langage afin de transmettre des émotions, des sentiments

II - Cependant, le poète est vu comme étant un prophète, seul intermédiaire entre Dieu et l'humanité

1 - Il se veut comme étant le révélateur d'une vérité qu'il doit transmettre à l'homme afin d'éclairer celui-ci
2 - ??



Si vous avez des idées, je vous remercie d'avance !

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Pour toute la seconde partie (mais aussi la première), j'ai développé un ensemble d'idées dans topics/57603-notice-dissertons-sur-la-poesie
Concrètement, je pense qu'il faut que tu regarde du côté du poète messager divin (avec ce que ça signifie), et en particulier en allant voir du côté du poète antique et de sa perception (particulièrement chez les grecs).

Si tu as d'autres questions, n'hésite pas !
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Pour le II], "seul" est un peu prétentieux, il faudrait sûrement mettre aussi le musicien. (qui à mon sens, encore plus que la poésie, touche au Divin , c'est à dire à un absolu transcendant peu définissable)

Ensuite, sur la notion de "vérité", ça me semble un peu... fondamentalement, j'ai plus l'impression que l'art qui révèle la vérité, "ce qui se passe", c'est la littérature, en particulier le roman. La poésie, comme la musique, me semble toucher à quelque chose qui est au-delà de la simple vérité, à une sorte d'extase des sensations, une révélation, au-delà du sens ou de la simple compréhension. C'est de là que ça touche au divin, au mystique presque. Alors c'est un peu ambigu d'appeler ça "vérité" je trouve.

( j suis un mauvais élève, je n'ai pas lu Nil, p-t qu'il le dit déjà tongue )
«Les gens exigent la liberté d’expression pour compenser la liberté de pensée qu’ils préfèrent éviter.» - Sören Kierkegaard

La République, c’est comme la syphilis : quand on l’a attrapée, soit on se fait sauter le caisson, soit on essaie de vivre avec.

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very (./3) :
j'ai plus l'impression que l'art qui révèle la vérité, "ce qui se passe", c'est la littérature, en particulier le roman.

Justement, non. Le roman ne révèle pas la vérité, au contraire : il décrit un [men]songe imaginaire. Dans l'antiquité, la question ne se pose pas, la poésie et le théâtre sont intrinsèquement liés. Le moyen-âge livre une vision sensiblement différente (il faudrait que je relise Eco sur l'etshétique médiévale, parce que c'est redevenu flou pour moi avec le temps), mais la pensée antique revient avec la Renaissance, à ceci près qu'on a cette spécialisation de la littérature comme biais de la réalité (spécialisation qui va aller crescendo jusqu'au XIXème siècle, où le roman est le lieu où on se perd, cf. Madame Bovary).

En fait, le point critique de la poésie comme vérité, c'est justement qu'il s'agit d'un message à déchiffrer. Il ne se donne pas facilement, il faut des clés. Même le poète (qui n'est au final qu'un messager divin, donc qu'un support de l'information, pas un créateur, si on pousse jusqu'au bout l'idée) peut ne pas saisir la substance de tout ce qu'il écrit. Pour avoir la "vérité" de la poésie, il faut passer par une exégèse (c'est très biblique, finalement, comme procédé de vérité, et ça permet aussi d'expliquer la position du roman : la poésie est de fait divin parce que hermétique à la pensée humaine ; le roman est un fait humain, donc faussé).

Concernant la musique, elle est à mettre au même niveau que la poésie. En fait, le travail fait sur la poésie au lycée recoupe globalement ce que les grecs présentaient à travers les muses (qui sont, d'après Platon, les médiatrices entre le poète et les dieux).

Ca, c'est la vision antique (parnassienne) de la poésie (qui reste toujours valable pour certains poètes et selon le point de vue de certaines personnes). C'est remis en cause par deux autres courants : les poètes engagés (romantisme) et les poètes de l'art pour l'art.

Quand on prend du recul sur ces trois modèles, on se rend compte au final qu'ils expriment exactement la même chose, mais d'un point de vue différent. Le poète engagé l'est-il de son propre fait, ou par impulsion "divine" (il faudrait d'abord définir ce mot ; on se rendrait compte qu'il a globalement la même signification que l'inconscient des romantiques) ? Les parnassiens (au sens du XIXème siècle), finalement, ne sont-ils pas eux-mêmes des poètes engagés, au même titre que les partisans de l'Art pour l'art ou, plus tard que les membres de l'Oulipo ? Enfin, ça déborde peut-être un peu du sujet original ^^
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Sinon pour
very (./3) :
Pour le II], "seul" est un peu prétentieux,

Je suis d'accord avec very, mais pas pour les mêmes raisons ; je veux dire que ça n'est pas pour y mettre les musiciens ou d'autres artistes. Il y a clairement, dans le monde occidental, un avant Jésus-Christ et un près Jésus-Christ au niveau de l'inspiration artistique divine (et ça a été accentué par le message de Mahomet). Les artistes vont, progressivement, perdre leur statut de "messager divin" (qui sera conservé pour un petit nombre, les prophètes, le Messie, certains saints illuminés...) pour - dans certains cas, prendre une sorte de statut d'inspiré de Dieu. Mais là, je pense qu'on est clairement aux limites du sujet, et ça demanderait de se plonger dans les écrits des doctes religieux sur l'art grin
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Hum en fait on a pas la même notion de vérité. Pour toi il semble y avoir une vérité au-délà des hommes (même si elle est sur les hommes ), dans le divin, et c'est pour ça que le poète y touche, parce qu'il touche au divin. Au contraire dans ta vision l'homme est plutôt fausseté, mensonge (péché originel ?) etc. Alors que ta vérité, d'ordre presque divine, est qqch qui donne du sens, enfin qui en apporte...

Moi, qui suit globalement acroyant mais pas totalement areligieux ( disons que je m'en préoccupe un peut tout en étant incapable de croire ), je ne peux pas situer la vérité dans le divin, dans un transcendant... la vérité reste au plus, dans cette vision, une description assez fidèle des choses telles qu'elles sont. Mais qui ne comporte pas forcément de sens, et qui reste elle-même imparfaite.

Enfin je crois qu'on est d'accord sur l'essentiel, l'antagonisme entre les deux, mais pas avec les mêmes mots, (et pas les mêmes jugements. ) voir des mots opposés. Instinctivement, pour moi, le poète ment (parcequ'il touche au Divin, suprême illusion humaine. Il s'occupe donc de perpétuer croyances et illusions. ), c'est pour ça qu'il s'attache tant à transcender le style, et le romancier va plutôt, même par la fiction, raconter ce qui se passe, décrire le monde, dans son réalisme et son cynisme. ( c'est pour ça qu'il démolit si souvent les croyances et illusions... )

Alors voilà, je vois le divin comme une illusion et donc le mensonge, tu le vois comme la transcendance et donc la vérité... Tu vois l'homme comme pêcheur donc menteur, je le vois comme un objet d'étude comme un autre, donc la vérité consiste seulement à le décrire....

Bon en tout cas si on en arrive si facilement à un débat sur le divin et la croyance, c'est que le poète touche bien au Divin. Mais c'est vraiment prendre parti que de dire que le Divin est la vérité.... ( on peut le concevoir comme le plus gros (men)songe )

Pour les modernes qui font fondamentalement la même chose sans en être conscient, tout à fait d'accord. ( d'ailleurs ça pourrait assez bien se généraliser. Leur prétention de s'être débarrassé des "vieux trucs", alors qu'ils font toujours la même chose sans même en être conscient, est d'ailleurs assez comique. )
«Les gens exigent la liberté d’expression pour compenser la liberté de pensée qu’ils préfèrent éviter.» - Sören Kierkegaard

La République, c’est comme la syphilis : quand on l’a attrapée, soit on se fait sauter le caisson, soit on essaie de vivre avec.

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very (./6) :
Hum en fait on a pas la même notion de vérité. Pour toi il semble y avoir une vérité au-délà des hommes (même si elle est sur les hommes ), dans le divin, et c'est pour ça que le poète y touche, parce qu'il touche au divin. Au contraire dans ta vision l'homme est plutôt fausseté, mensonge (péché originel ?) etc. Alors que ta vérité, d'ordre presque divine, est qqch qui donne du sens, enfin qui en apporte...

very (./6) :
Alors voilà, je vois le divin comme une illusion et donc le mensonge, tu le vois comme la transcendance et donc la vérité... Tu vois l'homme comme pêcheur donc menteur, je le vois comme un objet d'étude comme un autre, donc la vérité consiste seulement à le décrire....

Oh, ce n'est pas "ma" notion de la vérité, hein grin Disons qu'on n'est pas dans un contexte scientifique, donc qu'on ne se soucie pas de la vérité comme "accord de la pensée avec l'expérience", mais de la vérité comme "accord de la pensée avec elle-même" (là où le roman ne vérifie pas ça, parce qu'il est le fruit d'une autre démarche - bon, après, il y a toujours le cas des romans à fort caractère poétique, ou de la poétique fortement narrative).
Bien entendu, si on était dans un contexte fondamentalement scientiste, je serais d'accord avec toi. Mais là, on est justement dans la vérité, dans le sens où le texte ne peut pas mentir parce qu'il a une dimension qui va au-delà de la description d'un fait humain (et, comme je le disais, on peut très bien appeler "divin" "inconscient" - je pense d'ailleurs que ça n'est pas pour rien si la tragédie grecque (divine) a servi de support aux pères de la psychanalyse (inconscient)).


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Mais la tragédie grecque, c'est entre le roman et la poésie.. d'ailleurs des psy ne se privent pas de faire des lectures psy de certains romans... La Bible ressemble plus à un (des) long(s) romans qu'à de la poésie... Donc je sais pas, comme ça, je rapprocherais plus la poésie (chez les modernes) de l'extase mystique, du lien transcendent d'un homme vers Dieu (religieux ), et le roman... du mythe, voir du Livre dans sa majorité, du lien des hommes entre-eux ( sacré )... Les grands mythes et les grands romans sont toujours des œuvres qui disent beaucoup de choses - en décrivant, surtout - sur la nature humaine ou la société. D'ailleurs la psychanallyse sur la plupart des mtyhes dans le monde entier, qui sont rarement poétiques, ce sont des histoires, des romans....
Donc effectivement ce n'est pas pour rien si les psy prennent appui sur les mythes ou les grands romans et jamais sur la poésie. (à moins que ça soit assez narratif, enfin du roman en vers quoi.... ). Les romans expriment une vérité (au sens descriptif ou scientiste si tu veux... ), la poésie une extase délirante... (qui est peut-être LA caractéristique unique et véritable de l'homme, donc sa "vérité" en un sens tordu, mais excepté ça, ça m'en apprends pas beaucoup plus sur l'homme... )

Pour revenir aux grecques, il faut d'abord faire gaffe que ça a quand même pas mal changé depuis, et justement par eux, (invention du théâtre, séparation du cœur et de l'acteur, etc. ) donc il ne s'agit peut-être pas exactement des mêmes catégories. (je crois qu'on a dissocié pas mal de trucs depuis. Genre la séparation (opposition) roman/poésie n'existe pas. -- a moins de considérer qu'ils l'ont inventé, mais encore peu séparée: que le roman ce serait les acteurs, la poésie le cœur.. Enfin, à l'écrit, c'est une séparation inexistante...)

( sinon l'accord d'une chose avec elle-même, c'est de la cohérence, mais savoir que qqch est cohérent, c'est bien c'est beau mais ça n'apporte pas grand chose sur sa vérité.. enfin bon laissons tomber ce mot vérité... tu vas me taxer de scientiste borné...)
«Les gens exigent la liberté d’expression pour compenser la liberté de pensée qu’ils préfèrent éviter.» - Sören Kierkegaard

La République, c’est comme la syphilis : quand on l’a attrapée, soit on se fait sauter le caisson, soit on essaie de vivre avec.