tl;dr : y'a une différence entre le grand n'importe quoi où tout est permis et un peu de tolérance, entre le grammar nazi et le langage SMS
Nil (./21) :
- pour la France, c'est aussi la nécessité de remettre en cause des abus (clercs et notaires écrivaient en latin et imposaient ainsi qu'on passe par eux pour comprendre les textes établis)
Ce n'était pas des abus, ils utilisaient la langue, bien définie et bien précise, comprise à l'identique par tout le monde (éduqué) sur tout le territoire, où chacun était d'accord sur chaque terme et chaque concept, du droit, que était le latin depuis l'invention du droit romain.
Plus simple et efficace que d'utiliser le dialecte local qui pouvait sensiblement varier d'un village à l'autre !
Nil (./21) :
Je n'ose penser que tu aies écrit ce que tu as écrit dans un but uniquement trollatoire : ça ne te ressemble pas. Mais, d'un autre côté, tu es suffisamment cultivé pour ne pas connaître au moins les grandes lignes de ce que j'ai résumé... du coup, je me demande que nous a valu ta remarque
Ben en fait tu vas vraiment beaucoup plus loin que ma remarque ^^
En nous faisant une généalogie de la construction (centralisée) du français comme langue écrite, et donc en même temps de son uniformisation sur le territoire, puis de son imposition au peuple, tu veux me faire dire quoi ? Que je défend une langue "libre" contre une langue "figée", et que ça n'a aucun sens, car toute langue écrite, et le français particulièrement, est par définition assez figée ?
Disons que je suis réaliste et pragmatique, je ne vais pas défendre une langue écrite (officielle) totalement libre où tout le monde fait ce qu'il veut, par contre je pense que l'on a voulu normaliser et uniformiser à l'excès en France, notamment en matière de vocabulaire. Par exemple qu'il y ait deux graphies un peu différentes pour certains mots, ça ne pose a priori pas de problème d’ambiguïté (sauf exceptions), d'ailleurs ça existe un peu, quand l'usage et les écrivains ont forcé les académiciens.
Mais je t'avoue que sur le fond je suis un peu nostalgique du système médiéval (et même, dans une certaine mesure, romain, notamment vers la fin) : des langues vernaculaires vraiment vivantes, locales, variés, puis par-dessus une langue écrite pour les usages officiels et les échanges (inter)nationaux.
On avait à la fois quelques chose de vivant dans le peuple, et un outil liturgique, juridique, savant et littéraire commun en Europe, d'où d'ailleurs la grande facilité des échanges culturels d'alors (avec une aristocratie qui a longtemps été clairement plus européenne que nationale ). À l'époque, l'Europe existait vraiment, et les scientifiques se lisaient dans le texte mutuellement.
J'aime le français, j'en suis presque même prisonnier (je supporte très mal l'exil linguistique, sauf avec l'espagnol ), il n'empêche qu'il me semble que c'est une langue qui, a avoir été trop normée, trop formalisée, trop enseignée, a perdu de son souffle, de sa fraicheur.
Si mes deux écrivains préférés du XXém sont Céline et Cioran, je pense que c'est en bonne partie grâce à leur approche de la langue. Chacun dans un genre très, très, très différent, ils apportent une fraicheur, une liberté extraordinaire dans une langue alors très sclérosée.
Sur le fond, le français le plus beau, sophistiqué et précis était celui du Grand Siècle, et de loin. Depuis Rousseau c'est une décadence perpétuelle, qui s'empire continuellement, seules quelques têtes surnagent ici et là, éphémères réincarnations anachroniques de ce que fût cette langue, la plus belle du monde.