(Quelques recherches plus tard...)
Le post précédent se contentait de dire que la locution était correcte (ce qui en fait n’est pas vrai après vérification), mais ne l’analysait pas. D’ailleurs, je ne la comprenais moi-même pas vraiment.
Premièrement, la locution «
quoi qu’il en ait » est une altération de la locution «
malgré qu’il en ait ». Je reparlerai de cette altération à la fin de ce post.
La locution «
malgré qu’il en ait » a pour forme générale «
malgré que + (pronom personnel) +
en + (avoir au subjonctif) ».
Elle signifie « malgré soi », « malgré sa mauvaise volonté ».
Elle semble, dans la littérature, ne s’accorder la plupart du temps qu’avec la première et la troisième personnes du singulier (
malgré que j’en aie,
qu’il en ait), mais rien n’empêche de l’utiliser avec d’autres personnes. Par ailleurs, on la trouve parfois avec le verbe
avoir à l’infinitif (dans par exemple «
malgré qu’il puisse en avoir »).
Dans cette locution, on analyse
malgré non plus comme une préposition (
malgré moi,
malgré sa mauvaise volonté, etc), mais comme un nom archaïque (
malgré, le mauvais gré, la mauvais volonté), lui même formé d’un adjectif archaïque (
mal, mauvais) et du nom
gré (la volonté), suivi d’une subordonnée relative introduite par le pronom relatif objet
que.
On peut reformuler successivement la locution en formes de plus en plus décomposées :
malgré que j’en aie ->
mal gré que j’en aie ->
mauvais gré que j’en aie -> (passage à l’indicatif)
nonobstant le mauvais gré que j’en ai ->
nonobstant la mauvaise volonté que j’ai pour cela. (J’ai employé
nonobstant pour ne pas avoir à le faire pour
malgré sous sa forme de préposition, histoire ne pas pas rendre l’analyse encore plus confuse :
malgré (préposition)
le malgré (nom)
que j’en ai (indicatif)

)
La locution «
malgré que » (nom + pronom relatif) ne doit donc pas être confondue avec «
malgré que » (conjonction de subordination), qui quant à elle est suivie d’une complétive ; «
malgré qu’il en ait » ne s’analyse pas comme «
malgré qu’il soit de mauvaise volonté ».
Soit dit en passant, il existe une guerre séculaire entre les partisans et les ennemis de la locution conjonctive « malgré que ». Pour ses ennemis (dont je suis), c’est incorrect :
malgré est soit une préposition, soit un nom archaïque qu’on utilise dans «
malgré qu’il en ait » , et on ne lie pas directement une préposition ou un nom avec la conjonction du subordination
que : on emploiera plutôt «
bien que » ou «
quoique ». Ses partisans affirment que l’usage répété de «
malgré que » en a fait une conjonction aussi correcte que «
bien que ». Quoi qu’il en soit, « malgré qu’il en ait », bien qu’un peu vieilli et littéraire (note : essayez donc d’écrire « malgré qu’un peu vieilli et littéraire » pour voir

), bien qu’un peu vieilli et littéraire donc, est toujours correct.
Ensuite, nous avons des gens qui écrivent, comme l’auteur cité par Folco, «
quoi qu’il en ait ». Cette locution est plus ou moins courante chez certains littérateurs, mais rien ne la justifie. Elle doit probablement son origine à une confusion entre «
malgré qu’il en ait » et «
quoi qu’il en soit ». C’est un barbarisme, son emploi dénote un défaut d’analyse ou de compréhension de «
malgré qu’il en ait ». On trouve même certains auteurs qui écrivent «
bien qu’il en ait » ou même «
quoiqu’il en ait » : ce sont des fautes.
Il existe aussi «
en dépit que j’en aie » qui s’analyse comme «
malgré que j’en aie » et signifie à peu près la même chose, tout en étant plus recherché.